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Barulage et promenage

TURQUIE : réforme de la langue turque

13 Novembre 2006, 14:46pm

Publié par Barulaïre

             L'histoire de la langue turque est particulièrement riche et mouvementée, sa modernisation "tout d'un bloc" exceptionnellemnt rapide ; on la doit à Mustafa Kemal ATATURK.
              Le site de M. Jacques LECLERC de l'université Laval au Québec est très bien fait et clair et traite de toutes les langues du monde, ici le début de l'article sur la langue turque :

 


 

1 La réforme d'Atatürk (Dil Devrimi)


Atatürk (1881-1938)

Après l'effondrement de l'Empire ottoman en 1918, Mustafa Kemal Atatürk prit le pouvoir en Turquie en 1920. Mais il fut vite confronté à des conflits d'ordre militaire. Puis, après son élection au poste de président de la République en 1923, il entreprit une politique de modernisation et de laïcisation de l'État. La forme kémaliste du pouvoir a trouvé son expression juridique dans la Constitution du 20 avril 1924. D'après l'article 2 de cette constitution, la République, telle que décrite à l'article 1, était considérée comme «républicaine, nationaliste, populaire, interventionniste, laïque et révolutionnaire». Ces caractéristiques déterminent le contenu idéologique du Parti populaire républicain qui, sous Mustafa Kemal, était le seul parti unitaire toléré. L'un des volets de la politique de modernisation porta le nom turc de Dil Devrimi, c'est-à-dire la «révolution linguistique». Farouchement moderniste, Atatürk considérait comme révolu l'époque des empires fondés sur une base religieuse et refusait la magistrature suprême de l'islam sur son pays. En fait, il refusait l'usage de l'islam dans la gestion politique d'un État.

Mustafa Kemal considérait également que la réorganisation de l'État turc devait passer par un changement linguistique radical. Or, l'histoire compte peu d'exemples de ce genre où un gouvernement a entrepris des changements linguistiques d'une aussi grande envergure dans un délai aussi court et, il faut le reconnaître, avec autant de succès.

Durant l'Empire ottoman, la langue turque avait subi l'influence massive de l'arabe classique et du persan. L'élite dirigeante conduisait les affaires de l'Empire dans une langue turque savante et envahie de mots arabes et persans, appelée «turc ottoman». L'arabe était resté la principale langue de la religion et de la loi coranique, le persan était la langue des arts, de la littérature (la Dîvan) et de la diplomatie. Le turc parlé par le peuple, synonyme de «grossièreté» et de «rusticité», n'était réservé qu'à des fins administratives locales. Le turcologue Louis Bazin, auteur de «La réforme linguistique en Turquie» dans La réforme des langues (Hambourg, 1985), fait le portrait suivant de la situation linguistique sous l'Empire ottoman:

Dans l'État islamique théocratique et multinationale qu'était l'Empire ottoman, soumis à une acculturation arabe et persane intense dans ses classes dirigeantes — et spécialement dans la classe intellectuelle, comme celle des ulémas —, la langue écrite officielle et littéraire était envahie de termes arabes et persans, de plus en plus éloigné du parler turc vivant, et inaccessible à la masse populaire turque.

Soulignons aussi que l'alphabet utilisé jusque là transcrivait assez mal la langue turque dans la mesure où, par exemple, l'alphabet arabe ne permettait de noter que trois voyelles, alors que le turc comptait huit voyelles brèves et trois longues. La plupart des lettrés étaient conscients de la situation, mais il leur semblait impossible de pouvoir modifier un système graphique qui avait servi à transcrire le Coran.

 


 

LECLERCQ, Jacques. "La révolution linguistique de Mustafa Kemal Atatürk" dans L'aménagement linguistique dans le monde, Québec, TLFQ, Université Laval, 24 juillet 2006
http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/asie/turquie_2revolution_lng.htm (13 novembre 2006).

            Les paragraphes suivants traitent de manière détaillée : 
- du nouvel alphabet,
- de l'épuration du vocabulaire,
- mais aussi de la Turquie actuelle.

            A lire absolument !

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